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Comprendre les malaises actuels de notre société

Stress, souffrance au travail, dépression…Comprendre les malaises actuels de notre société

Alain Erhenberg, sociologue français, directeur de recherche au CNRS, nous explique comment les revendications de liberté des années 60 ont évolué aujourd’hui vers le culte de la performance, et ses revers que sont le stress, la dépression, la souffrance au travail... Vous pouvez écouter sa conférence (1h30) sur canal U, ou lire mes notes résumées ci-dessous, car comprendre les fondements du malaise actuel de la société, être lucide, élargir notre conscience, nous aide à prendre du recul, et sans doute à mieux vivre.

 

Le malaise prend ses racines dans les années 60 qui amorcent la grande transformation de la société avec une série d’éléments nouveaux  : la recherche du bien-être, le renforcement de la protection sociale, la croissance, la mobilité géographique, les politiques du logement, d’éducation, d’équipement collectif…Toutes ces nouveautés ont trois conséquences :

  • l’ouverture des possibles (début de l’ ‘ascenseur social’);
  • la diminution des aléas de l’existence (la sécurité matérielle s’accroît);
  • et une plus grande indépendance vis-à-vis de la communauté d’appartenance (la famille, le quartier, l’entreprise…).

Tout au long des années 70, nous sortons d’une morale du devoir, d’une société organisée, de l’interdiction, de l’uniformité, de l’exécution mécanique… pour aller vers une morale du développement personnel. Les règles sont ébranlées, c’est l’apparition de ‘L’individu souverain qui n’est semblable qu’à lui-même’ (Nietzsche). Ce qui était réservé  à une élite sociale et à une communauté artistique devient un idéal commun; nous assistons à un processus de démocratisation de l’exceptionnel.

A partir des années 1980, fin des 30 glorieuses, la société française entre dans le monde de la concurrence et des compétitions. De nouveaux figures envahissent l’imaginaire social : sportifs, héros de l’extrême, chômeurs créant leur propre entreprise….  le monde de l’action, du dépassement de soi… Bernard Tapi – qui a même animé un show du nom symbolique ‘d’Ambition’ –  est un VRP de ce mode de vie.

Aujourd’hui, nous sommes peut être à la fin de la lutte des classes, mais les inégalités se recomposent. L’idéal devient d’être entrepreneur de sa propre envie. Les exigences d’action et de performance s’accentuent  pour tous. Ainsi pour trouver un emploi, même précaire, il faut faire preuve de motivation, de capacité de représentation de soi, d’être capable de passer des contrats…Le modèle disciplinaire recule au profit de modèles qui incitent à l’autonomie dans toutes les strates de la hiérarchie. L’agent devient progressivement le seul responsable de son action et de sa capacité à évoluer. Il y a report des responsabilités des organisations vers l’individu. A l’aspiration de l’autonomie s’ajoute la contrainte de l’autonomie.

Auparavant les psychanalystes soignaient des névroses, c’est à dire des pathologies mentales résultant de conflits psychiques remontant à la petite enfance. Depuis les années 80, de nouveaux troubles psychologiques sont apparus, il ne s’agit plus de névroses ; les patients manifestent une sorte d’absence de limite de soi et un besoin d’Être, accompagnés de la peur de ne pas être à la hauteur de leurs propres idéaux. C’est une pathologie de la grandeur ! Ainsi du culte de la performance à l’effondrement psychique, nos sociétés ont fini par donner forme à une culture du malheur intime inédite. La performance, l’épanouissement individuel et la vulnérabilité de masse forment un tout qu’Alain Erhenberg appelle la nervosité dans la civilisation.

 

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